Depuis le XIXe siècle, on ne cesse de répéter paresseusement la fameuse métaphore de la fermeture et de la nécessaire réouverture de la « porte de l'ijtihad ». Cette expression nourrit les discours incantatoires de théologiens autopromus qui ignorent tout des conditions intellectuelles et scientifiques d'accès au rang et aux fonctions de tout docteur en sciences islamiques. On laisse croire qu'il suffit de réclamer le retour à l'ijtihad médiéval pour rétablir l'instance de l'autorité théologico-juridique et exégétique qui a fonctionné dans l'islam classique dans les conditions exceptionnelles d'un pluralisme doctrinal particulièrement fécond. J'ajoute que l'attitude réformiste affichée par un nombre croissant d'apprentis imâms n'a jamais dépassé jusqu'ici des bricolages exégétiques simplistes qui redonnent une certaine confiance aux croyants et aux croyantes entraînés en fait vers les usages ritualistes et idéologiques d'un islam de combat politique.